Objectifs scientifiques

Les nuages ont un rôle prépondérant dans le bilan radiatif terrestre du fait de la forte interaction entre les hydrométéores (gouttelettes d’eau et/ou cristaux) qui les constituent avec le rayonnement solaire et tellurique. Améliorer la connaissance des interactions nuage-rayonnement et la compréhension du rôle des différents nuages dans le système climatique nécessite de bien connaître leurs propriétés optiques et microphysiques afin d’améliorer leur représentation dans les modèles atmosphériques.

La caractérisation et la prise en compte de l’inhomogénéité verticale et horizontale des nuages ainsi que la caractérisation des propriétés optiques des nuages de glace à la microstructure complexe comptent parmi les défis scientifiques actuels et, sur ce point, la mesure in situ est un levier fondamental, que ce soit pour le développement de paramétrisations empiriques (ex. : relation entre extinction et contenu en glace) ou la validation de modèles analytiques. En France, la communauté scientifique dispose d’un outil de recherche dédié à l’étude des nuages et particulièrement bien adapté à la phase glace : la Plateforme de Mesures Aéroportées (PMA).

L’extinction (ou l’épaisseur optique qui en découle) est une propriété optique fondamentale qui caractérise l’atténuation d’une onde lumineuse traversant un milieu du fait des processus d’absorption et de diffusion. Elle est souvent décrite à l’aide du coefficient d’extinction. Certains instruments de la PMA comme le néphélomètre polaire ou les spectromètres/imageurs 2D offrent la possibilité de calculer l’extinction à partir de mesures in situ avec des valeurs d’incertitude estimées entre ±60 % pour le calcul à partir de la surface géométrique, à ±25% pour le calcul à partir de l’indicatrice de diffusion mais aucun ne permet la mesure in situ directe du coefficient d’extinction volumique. Cette mesure enrichirait l’offre de mesure de la PMA d’une mesure complémentaire, à la fois point de comparaison pour parfaire la maîtrise des instruments à partir desquels l’extinction est calculée (quantification des incertitudes), et mesure de référence dans le développement de paramétrisations reliant les propriétés optiques et microphysiques dans les nuages.

Sur le principe, déduire le coefficient d’extinction d’une mesure de transmission par application de la loi de Beer-Bouguer-Lambert est bien établi mais l’état de l’art montre qu’une fraction de l’intensité mesurée par le transmissiomètre provient en fait de la diffusion vers l’avant, très proche de l’axe optique, de la lumière incidente par les particules de nuages. Face à la variabilité des propriétés de diffusion des hydrométéores naturels, il n’est pas possible d’établir des fonctions théoriques simples pour corriger a posteriori la mesure de transmission. L’approche la plus prometteuse consiste donc à estimer par la mesure la fraction de puissance contaminant la mesure de transmission en réalisant des mesures coïncidentes et co-localisées de l’intensité transmise à travers un volume de nuage et de l’intensité diffusée proche avant par les hydrométéores. A ce jour, il n’existe pas d’instrument commercialement disponible et les prototypes d’extinctiomètre aéroportés existants souffrent de limitations techniques (prise en compte insuffisante des effets de la diffusion proche avant) qui peuvent introduire une erreur d’un facteur 2 pour les nuages en phase glace ou précipitants incompatibles avec les exigences scientifiques.

Description technique

L’équipe du LaMP en charge de la PMA a donc décidé d’inscrire le développement d’un tel instrument à son plan de développement pour la période 2020-2024. Afin de limiter le risque lié au caractère exploratoire de ce projet et de développer une meilleure compréhension de ce principe de mesure en présence d’hydrométéores aux propriétés radiatives complexes, le LaMP souhaite d’abord concevoir un prototype sol (maturité technologique TRL 5 minimum) permettant de mesurer au sol (en laboratoire ou sur site de mesure en plein air) l’extinction optique en environnement nuageux tout en limitant la complexité technique intrinsèque au développement d’une sonde aéroportée.

La collaboration initiée en mars 2020 entre personnels du LaMP, de l’Observatoire de Physique du Globe de Clermont-Ferrand (OPGC/SDT) et de la DT-INSU, tous rattachés à l’INSU va donc continuer.
Grâce à cette collaboration, les bases du projet ont été posées permettant la rédaction d’un cahier des charges décrivant le principe de mesure retenu, les exigences scientifiques ainsi que l’environnement d’utilisation et les fonctionnalités attendues du prototype. Les études préparatoires réalisées ont permis de sélectionner le principe de mesure et de proposer une architecture optique audacieuse, inspirée de solutions techniques existantes ou prometteuses (emploi d’un capteur CCD pour mesurer la diffusion sur une plage d’ouvertures angulaires). La phase de conception du système optique est engagée : l’équipe travaille actuellement à la modélisation numérique de l’instrument (à l’aide du logiciel Zemax/OpticStudio) et à la réalisation d’un démonstrateur de paillasse afin de dérisquer progressivement la mesure. Une revue de conception du système optique est envisagée pour la fin 2020.
La contribution de la DT-INSU a été essentielle sur l’ensemble du travail accompli au cours de la première année, tant sur le plan de la méthodologie projet que par l’expertise technique qu’elle apporte.

Pour la première année, la contribution de la DT-INSU a permis :

  • la rédaction d’un cahier des charges (principe de mesure retenu, exigences scientifiques, l’environnement d’utilisation, fonctionnalités attendues).
  • la rédaction d’un arbre produit initial de l’instrument.
  • la modélisation optique numérique de l’instrument à l’aide du logiciel Zemax.

Tous ces travaux ont initié une identification des éléments catalogues optiques mais également électroniques, en vue d’un démonstrateur du principe de mesure. Ce démonstrateur est une pré-phase à la conception du prototype.

Contact DT : Johann Gironnet
Contact LaMP : Pierre Coutris