Objectifs scientifiques
Le rôle des océans et de la pompe biologique dans la régulation du CO2, en relation avec le réchauffement global, est maintenant reconnu. Ce changement climatique devrait induire des évolutions dans le régime hydrologique (stratification des eaux de surface), avec diminution des phénomènes de « cascading » ou de convection, processus pourtant déterminants dans la ventilation des eaux profondes. Certains évènements extraordinaires ont déjà été observés en Méditerranée. L’étude de l’évolution de la concentration en oxygène in situ et de sa dynamique associée est un des éléments clés indicateurs de l’évolution de l’écosystème. Les flux de production en surface sont aussi déterminés par la profondeur de la couche de mélange et de sa température associée. Près de 50% de la production de surface (représentative du fonctionnement de la pompe biologique) est exportée dans les zones plus profondes sous forme de matériel organique dissous et particulaire constituant les principaux vecteurs d’exportation de carbone et d’énergie dans les eaux intermédiaire et profonde jusqu’au sédiment. L’intensité de ces flux d’export et la qualité du matériel organique exporté (dissous ou particulaire) va conditionner l’activité des microorganismes marins dans l’océan profond et impactera la concentration en oxygène dissous. Les mesures d’activité biologique vis-à-vis de l’oxygène (photosynthèse et re-minéralisation) sont appréhendées par des méthodes classiques d’incubation et la détermination par titrage chimique de l’oxygène dissous en flaconnage dans la zone épipélagique. En profondeur, seuls des proxys permettent d’estimer les vitesses de reminéralisation (activité ETS, isotopes stables, flux d’export estimé à partir de pièges à particules…).
Dans le cadre de divers projets (ANR POTES, programme européen FP7 EuroSITES, APO, OPERA (INSU), AAMIS (Université de la Méditerranée)), des systèmes de mesure in situ de la re-minéralisation de la matière organique (MO) dans les zone épi, méso et bathypélagique ont été développés dans le cadre d’une collaboration étroite avec le Centre de Physique des Particules de Marseille : In situ Oxygen Dynamic Auto-sampler (IODA6000). Cet équipement unique est innovant pour le développement technologique (mécanique, électronique et alimentation) sous pression (6000 m de profondeur).
Description technique
Le IODA6000 est un incubateur in situ qui permet de mesurer la dynamique de la concentration d’oxygène. La concentration d’oxygène est mesurée par une optode, un principe de mesure optique de l’O2 sensible à de faibles variations de concentration.
La version originale se compose d’une cuve d’incubation en polycarbonate dont l’étanchéité est faite par 2 plaques de silicone Versilic. Deux optodes permettent de mesurer la concentration d’O2 in situ, et la dynamique de la concentration d’O2 à l’intérieur de la chambre d’incubation.
L’ensemble de l’appareil est entièrement automatisé ce qui le rend autonome avec la possibilité de modifier les paramètres d’incubation (temps d’incubation, fréquence de mesure d’oxygène et temps d’ouverture pour renouveler l’eau) en fonction de la profondeur d’immersion avant le déploiement. Cet instrument peut descendre jusqu’à 6000 m de profondeur.
Généralement, le temps d’incubation en surface (entre 0 et 500 m) est de 24h. Cette durée de cycle suffit à mettre en évidence la dynamique de la concentration d’oxygène (production et consommation), tandis qu’au-delà de 500 m, plusieurs jours sont nécessaires (5 jours pour 2000 m de profondeur).
Rôle de la DT
État des lieux des tâches 2022-2023 :
- Comme planifié lors de la demande précédente, le IODA été déployé avec les systèmes RESPIRE pour les tests en vue de la préparation de la campagne APERO programmée en 2023 sur le NO Pourquoi Pas en Atlantique nord. Ces tests ont été réalisés à petite échelle sur le NO Sagitta III sur le site DIFAMED.
- Participation au leg 1 de la campagne MOOSE GE sur le NO Pourquoi Pas en septembre 2022, pour un déploiement des systèmes RESPIRE, VISU Trap et IODA sur la même ligne de mouillage, préparation de la compagne APERO.
- Les résultats acquis lors de ces déploiements (2 déploiements de 48 heures chacun) mettent en évidence le bon fonctionnement mécanique et logiciel du IODA avec l’ouverture de la fermeture bien visible sur les signaux de température et de l’oxygène. Par contre l’amplitude du signal sur le premier cycle pose problème, et doit être investigué avec soin. Le second cycle est cohérent avec les attendus. Un autre artefact est la décroissance rapide de la valeur d’oxygène lors de la fermeture de la cuve. Décroissance qui impacte le signal de signature biologique recherché.
- Un deuxième et troisième IODA ont été construits et testés au laboratoire pour la campagne APERO. Test effectués pour caractériser le comportement des IODAs et la répétabilités des cycles. Pour cela un dispositif expérimental a été installé au SAM-MOI avec pompe et sans pompe et une suite de cycles courts a été programmé.
- Les 3 IODA ont été déployés avec succès lors de la campagne APERO en juin-juillet 2023 à bord du NO Pourquoi Pas.
Les résultats issus de ces tests ont très probants. Nous avons réussi à reproduire cet effet de décroissance d’O2 à la fermeture et mis en évidence que cet effet est lié à la dynamique physique externe à la cuve lors de la fermeture. Il s’avère que lors de la fermeture des cuves, il y a une dissipation de l’énergie cinétique turbulente qui impacte le comportement de l’optode et donc la valeur d’oxygène fournie par le capteur. Ce travail doit être modéliser en collaboration avec des physiciens.
Demandes pour 2024 :
- Réunion de debrief sur les déploiements APERO 2023 et les retours d’expérience.
- Evolution de l’électronique embarquée.
- Participation à la campagne HOPE (Projet ERC – MIO) en Nouvelle-Calédonie.
- Étude du transfert des IODAs vers le MII/SIOUX (mode connecté) et la ligne ALBATROSS (mode inductif et autonome).
Contact DT : Carl Gojak
Contact MIO : Dominique Lefevre