Déploiement d’un MSC (photo OSIL)
Objectif scientifique

La pompe biologique de carbone (PBC) est un processus qui, à travers la chute de particules organiques (neige marine), transfère une partie du carbone (C) prélevé de l’atmosphère par photosynthèse vers l’océan et ses profondeurs. Durant leur chute vers les profondeurs, ces particules organiques sont reminéralisées et les éléments qui les constituent (e.g. C, N, P, Si, Ca, Fe….) sont solubilisés en matière dissoute inorganique. La communauté scientifique s’accorde à penser que, sans la pompe biologique de carbone, la concentration atmosphérique en CO2 serait de 100 à 200 ppm plus élevée qu’elle ne l’est actuellement. Les modèles numériques ont montré que la profondeur à laquelle les particules organiques sont reminéralisées (profondeur de reminéralisation) influe de manière importante sur la concentration de CO2 dans l’atmosphère.

Le processus que constitue la PBC est divisé en trois étapes distinctes : la production de matière organique en surface (dans la zone euphotique), la chute de particules organiques et enfin la décomposition (reminéralisation et fragmentation) de ces particules dans l’océan non éclairé (zone mésopélagique) et profond (zone bathypélagique). Le phytoplancton, grâce à la photosynthèse, génère ces particules de matière organique. La matière organique formée et agrégée est donc disponible pour les consommateurs (procaryotes et zooplancton), elle est ainsi dégradée/reminéralisée par les processus d’assimilation, de respiration, d’excrétion et de dissolution en surface. Cependant, une certaine quantité de ce carbone n’est pas reminéralisée et est effectivement exportée en dehors de la surface des océans. Une portion encore plus petite de ce carbone résiste à la reminéralisation en profondeur et est ainsi séquestrée dans les sédiments (sur des échelles de temps géologiques) par diagenèse. Il est par conséquent fondamental de contraindre les mécanismes de contrôle de la PBC. Toute recherche en ce sens a donc une influence sur notre compréhension de la biogéochimie marine, mais aussi sur le cycle du carbone à l’échelle globale et par extension sur la température de la planète.

D’un point de vue technique et technologique, l’échantillonnage adéquat de neige marine est une première étape nécessaire à l’étude des processus régulant la production, la vitesse de chutes et la reminéralisation liés à la PBC. Les pièges à sédiments classiques sur ligne de mouillage, qui ne sont conçus que pour mesurer le flux de C en profondeur (là où les courants sont moins forts), empêchent toujours d’obtenir l’export instantané de carbone depuis la surface (0-1000 m). De plus, ces outils ne permettent pas de récolter de la neige marine fraiche d’un point de vue aussi bien biologique (communautés microbienne associées), morphologique (perte de la forme initiale de la neige marine), que chimique (perte de certain signaux chimiques avec le temps). L’utilisation des pièges à particules dérivants semi lagrangienne a ouvert de nouvelles perspectives dans l’étude de la PBC. On parle désormais plus de pièges à particules que de pièges à sédiments pour décrire ces pièges dérivants car ces derniers permettent un travail plus spécifique sur la neige marine et ses caractéristiques. Cependant, cette technologie nécessite une mise en œuvre importante (ligne dérivante d’environ 500 m) à bord des navires. Celle-ci n’est parfois pas possible sur des bateaux de taille moyenne (type Téthys II, l’Europe) en raison des conditions de mer limitantes (hauteur de vagues supérieure à 1.5 m) ou sur des zones à fortes activités maritime et militaire. Le Marine Snow Catcher (MSC) permet d’échantillonner un volume limité de neige marine sans procéder à la mise en œuvre d’une ligne de mouillage et donc sans les contraintes associées.

Description technique
Déploiement d’un Marine Snow Catcher et catapultage du messager

Le MSC est un instrument qui échantillonne un grand volume d’eau (>100 litres), il est ensuite ramené à bord, puis laissé au repos pendant deux heures, ce qui donne le temps aux particules marines de sédimenter au fond de cette grande bouteille dont le fond est spécifiquement conçu pour collecter les particules sans les endommager et sans créer une “sur-agrégation” souvent observée dans les pièges à particules classiques. Actuellement, le MSC est déployé seul attaché à un câble non électroporteur et est déclenché à l’aide d’un messager conventionnel.

Ce design limite considérablement l’emploie du MSC en temps de câble. L’idée est de réaliser une rosette électroportée de support pour 4 MSC en croix. Ces améliorations garantiraient une plus grande quantité de particules pour des mesures ou des expérimentations plus poussées (écologie microbienne, omics, minéralogie, densité, vitesse de chute, couleur vs compaction/labilité des particules, etc…). Cela représenterait un gain de temps considérable en terme de vitesse d’échantillonnage et donc d’optimisation du temps de bateau alloué a cette tâche (multiplié par quatre). De plus, un déploiement à partir d’un treuil (e.g. treuil électroporteur) et non d’une grue annexe représenterait un gain de sécurité considérable.

Les objectifs liés à cette demande sont donc multiples :

  • Accroitre la quantité d’échantillons récoltés et optimiser grandement le temps de bateau alloué aux activités marine snow catcher.
  • Optimiser l’utilisation du marine snow catcher sur tous types de navires.
  • Garantir la sécurité.

Le caractère transverse de cette demande est donc important. Les nouvelles capacités d’échantillonnage ouvertes par la rosette ROMARIN pourront, par conséquent, permettre à une nouvelle communauté (au-delà de la communauté « biogéochimie de l’océan ouvert » classique) de s’intéresser à la neige marine et cela d’un point de vue écologique, de microenvironnements, de vecteurs potentiel de polluants (plastiques, métaux lourds, composés organiques).

Contact DT : Cédric Brachet

Contact MIO : Marc Garel